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Fracturation hydraulique : procès en vue pour Encana

avril 29, 2011
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Publié le 29/04/2011 à 07:27  © Enerzine.com

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Fracturation hydraulique : procès en vue pour EncanaUn procès historique à propos de la fracturation hydraulique et ses impacts sur la nappe phréatique sur le territoire Nord Américain a débuté mercredi devant les Nations Unies à New York.La plaignante – Jessica Ernst (photo ci-contre ) – est une propriétaire de terrains fonciers qui accuse EnCana, Alberta Environment et Energy Resources Conservation Board de négligence et d’activités illégales.Il y a presque une décennie, EnCana, l’un des plus importants producteurs mondiaux de gaz naturel, a commencé un programme de forage « risqué et expérimental » nécessitant de la fracturation hydraulique intense afin d’extraire du méthane, en couche peu profonde dans la formation Horseshoe Canyon au cœur de l’Alberta (Canada).

La fracturation hydraulique provoque des failles dans les formations géologiques contenant du pétrole, du gaz et du charbon grâce à de grandes quantités d’eau injectées à haute pression avec du sable et des mélanges de fluides ou de gaz chimiques non divulgués. La technique permet d’exploiter des réserves de gaz naturel jusque-là inaccessibles, mais est l’objet d’enquêtes gouvernementales sérieuses à travers l’Amérique du Nord à cause de contaminations d’eaux de surface et souterraines.

Le principal organisme de contrôle de l’Alberta, l’Energy Resources Conservation Board (ERCB), a révélé dernièrement que le potentiel des chimiques des fluides de fracturation et le gaz naturel de contaminer les aquifères d’eau potable est une véritable question d’intérêt public, surtout dans les régions peu profondes.

Mercredi matin, les avocats de Jessica Ernst ont déposé une réclamation de 73 pages (.PDF) qui prétend qu’EnCana a enfreint à plusieurs lois et règlements provinciaux ainsi qu’avoir contaminé un aquifère peu profond desservant une communauté rurale avec du gaz naturel et des chimiques toxiques utilisés par l’industrie.

La réclamation détaille méthodiquement comment les deux principaux organismes de contrôle de l’eau souterraine de l’Alberta, Alberta Environment et le ERCB, ont « manqué dans leur tâche de suivre les procédés d’enquête et de mise en application qu’ils s’étaient fixé et avaient rendus public. »

Le ERCB avait donné dernièrement la permission à EnCana de forer et fracturer davantage de puits au-delà de la protection minimale de l’eau souterraine près des puits d’eau potable mentionnés dans cette réclamation.

Les Nations Unies ont invité Jessica Ernst à présenter son histoire et faire des recommandations aux gouvernements à la 19e session de la Commission de Développement Durable à New York la semaine prochaine. Les déclarations n’ayant pas été prouvées en cour de justice, tous les défendeurs auront la possibilité d’y répondre durant ces procédures.

Commentaire de jl06 : Quelle issue? quelles leçons?

Le dossier semble bien ficelé et s’appuie sur une mise en cause technique et juridique. Pour ceux qui n’auront pas le temps de le parcourir, voici ce que j’en retiens:
+ Fracturation hydraulique peu profonde (à 200 m dans le charbon, mais aussi à 100 m directement dans l’aquifère suivi de 121 m dans le charbon).
+ Non-respect des lois et des règlements, concernant les opérations sur aquifère notamment.
+ Affirmations contradictoires et non respect des engagements de l’opérateur
+ Mise en cause du régulateur provincial en charge du contrôle de l’application systématique des lois et règlements miniers.
+ Ramifications socio-politiques importantes dans le contexte albertain la veille – quasi-littéralement – d’élections fédérales

Les conditions de réussite de la fracturation hydraulique dépendent 1/ d’un contexte géologique favorable et 2/ d’une bonne connaissance des contraintes in-situ. La fracturation à faible profondeur (disons pour donner un ordre de grandeur qu’il faut préciser suivant les cas, à moins de 1000 m) ne donne pas nécessairement toutes les garanties nécessaires et demande des études très pointues autour de cette valeur (jusqu’à 700-800 m par exemple). Mais à 200 m, on aura bien du mal à prévoir et à maitriser la fracture. On sait qu’elle se propagera horizontalement, mais d’une part les écarts verticaux pourront être importants  (relativement à la profondeur) et d’autre part la réactivation des failles et fissures existantes ne demandera que peu d’énergie. Donc seule les petites opérations devraient être envisagées, et encore (pas de données techniques pour l’instant sur celles dont il est question).
Quant à la perforation dans l’aquifère, sans avoir entendu la version de la société, on ne peut pas penser que cela ait été délibéré (pourquoi?). Mais voilà: avec 20 m de marge à peine par rapport à l’objectif, l’erreur a été commise et l’impensé aussi. La première erreur est de concevoir des opérations de ce type si près d’aquifère d’une part et si peu profond d’autre part.

Quant à l’issue de la procédure, je me demande si on en verra beaucoup plus ou si un arrangement à l’amiable sera trouvé avant que l’affaire ne reçoive plus de publicité médiatique. Mais on peut s’attendre à des changements en Alberta où plusieurs affaires pourraient recevoir plus d’attention. En tout cas, le dossier, lui, restera, et je trouve le récit particulièrement instructif. Il devrait inciter tous les intéressés, y compris en Europe, à mettre en place une règlementation forte, les moyens d’en assurer l’application et le contrôle, ainsi que des organisations indépendantes (pas facile) reconnues. Ceci n’est pas limité à l’exploitation d’hydrocarbures et est valable à mon sens quel que soit le l’activité industrielle.

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